Le choix de l’aménagement intérieur a été déterminé par les meubles des appartements témoins présentés pour la reconstruction du Havre et destinés aux sinistrés : séjour de René Gabriel (exposition de l’Urbanisme, 1947) ou chambre d’enfants de Marcel Gascoin (Porte océane et quartier du Perrey, 1952-1953). Ces décorateurs saisissent pleinement l’idée du « luxe pour tous » et leurs meubles sont largement diffusés.
René Gabriel, « ensemblier des classes pauvres », crée un mobilier aux lignes sobres et classiques, destiné à une production en série de qualité.
Marcel Gascoin reprend ces principes et s’inspire des modèles nordiques pour se lancer lui-même dans l’industrialisation. L’exécution de leurs meubles est dictée par trois mots clefs : solidité, rationalité, adaptabilité ; ils marquent aussi une distance avec l’Avant-garde en conservant une image du « foyer » qui n’exclue pas les matériaux et les formes traditionnels. Aujourd’hui oubliés, ces décorateurs sont pourtant à l’origine du design et ont transmis leur savoir-faire aux générations qui vont suivre (Pierre Guariche…).
Ce mobilier se base sur un vocabulaire minimal et standardisé, il se traduit par des matériaux simples, bruts et robustes (chêne, hêtre), dégageant une certaine unité, désignée comme le « mobilier reconstruction » (cf. Patrice Favardin) ou « IV république ». Plus qu’un style, ces décorateurs insufflent la modernité dans tous les foyers : utilisation rationnelle de l’espace afin de faciliter l’entretien et le déplacement, simplicité et flexibilité des usages adaptés aux besoins, réorganisation de la distribution intérieure et création d’un mobilier innovant.